Rendez-vous (Galant?)

L’Elfik était un magnifique restaurant, décoré à l’ancienne. En fait, il n’avait pas l’air d’un bâtiment, mais bien d’une œuvre d’art format géant. Il se démarquait gracieusement de ses concurrent tant par sa taille imposante que les personnes de la haute classe de la société qui le fréquentait. C’était l’endroit de prédilection pour quelconque rencontre, spécialement si on tient à faire plaisir à la personne qu’on y invite. David le savait bien. Pas question d’emmener son tout nouvel ami dans un restaurant miteux, ou encore plus pire : dans un fast-food (Quoique Ryuuga avait l’air d’en manger souvent). David se gara. Ils allaient détonner dans cet environnement riche et prétentieux, mais il ne s’en souciait guère. Le jugement des autres n’était plus une menace, mais bien une habitude. Le jeune homme ne put s’empêcher de se demander si c’était la même chose pour l’ange qui l’accompagnait. Si on s’était moqué de lui, si on l’avait ridiculisé, s’il portait ce genre de souvenirs comme un fardeau…

Toujours en se tenant sa main, ils traversèrent le petit chemin de pierre qui menait à l’entrée du restaurant (Constitué de deux magnifiques portes en verre). Comme David l’avait fait à son appartement, il tenu la porte pour Ryuuga. Il passa après. L’ambiance de l’Elfik était agréable : on parlait, on riait, on s’amusait, on dégustait. Le restaurant était presque plein; à première vue, on pourrait penser qu’il n’y avait plus une place, mais David savait bien que c’était faux. Il ne savait pas comment ils faisaient, mais il y avait toujours une table pour les clients. En fait, c’était peut-être pour ça que le restaurant était aussi fameux!

« Une table pour deux, monsieur? »

Il releva vivement la tête, et observa son interlocuteur : un jeune serveur âgé d’une vingtaine d’années. Il lui souriait, mais David ne lui rendit pas. Il avait l’esprit trop préoccupé pour penser à sourire à un parfait inconnu. David répondit, d’un ton sec et froid :

« Oui. »

Le garçon inclina la tête, prit deux menus entre ses mains, et déclara :

« Suivez-moi. »

Il les conduit à une petite table au fond du restaurant. Cependant, elle se situait à proximité d’une fenêtre qui donnait une fantastique vue sur un paysage verdoyant. David s’assit et y plongea un instant son regard, voulant paraitre fasciné par ce qu’il voyait. En vérité, il s’en fichait complètement. Ses pensées étaient trop occupées pour ça. Et tous ses songes tournaient autour de Ryuuga. Il pensait à lui, ses sentiments, ses pouvoirs, cette fameuse menace qu’il lui avait prédits (C’était la première fois qu’il y repensait depuis la veille) et, bien entendu, cette histoire de protégé. Cette histoire lui avait tourmenté l’esprit le long du voyage. Avant de quitter l’appartement de Ryuuga, il était sûr d’accepter, mais maintenant, il ne savait plus. C’était étrange, tortueux même, pour lui. David voulait rester avec Ryuuga, ça, c’était certain. Il ne pouvait douter de ça. Aussi, le chasseur ne pouvait plus nier le fait qu’il éprouvait des sentiments pour lui. Si ce n’était pas le cas, il n’aurait jamais emmené Ryuuga chez lui, ils n’auraient pas dormit dans le même lit, ils n’auraient pas prit le temps d’aller chez lui, il ne lui aurait pas fait ce câlin, et surtout, surtout, ils ne seraient pas au restaurant en ce moment. David ressentait réellement quelque chose pour l’ange déchu face à lui. Cette chose qui allait germer, grandir, et former un sentiment complet et puissant, qui s’emparerait de David chaque fois qu’il poserait (ou songerait) à Ryuuga. Il détacha son regard du paysage pour le poser sur Ryuuga. David s’efforça de lui sourire, puis plongea son regard dans le menu, qu’il parcourut rapidement. Il ne s’y intéressait pas tellement, David pensait à une conversation qu’il pourrait employer. Devrait-il parler de ce sujet de protégé, ou était-ce trop tôt? En y réfléchissant, sa main droite vint caresser inconsciemment celle de Ryuuga sur la table.

« Ryuuga… » Commença-t-il d’un ton très doux

Le chasseur réfléchissait rapidement à ce qu’il pourrait dire.

« J’y aie réfléchit, et je pense que…
- Êtes-vous prêt à commander messieurs? »

David sursauta. Il n’avait vraiment pas entendu le serveur arriver, trop concentré sur le jeune ange en face de lui. Il soupira. David se sentait un peu comme dans un film, où le personnage principal est toujours coupé pendant une révélation qu’il allait faire.

« Oui, je vais prendre une lasagne. Et toi, Ryuuga? »

David observait attentivement Ryuuga. Il l’écoutait aussi. Il parlait, parlait, parlait… Prononçait des lettres, des consonnes, des voyelles qui formaient des mots, qui, à leur tour, formaient des phrases. Mais David n’avait pas l’impression que ce qu’il entendait lui était destiné. Non, en fait, il avait le sentiment que Ryuuga parlait pour lui-même, pour se convaincre d’une vérité forgée dans les abîmes d’un quelconque esprit craintif. Et puis, son langage corporel était très éloquent. À travers son métier, le jeune chasseur avait apprit à comprendre et à reconnaitre les expressions corporelles, qui sont bien plus évocatrices que tous les mots qu’on peut prononcer. Se pourrait-il que l’ange ne pense pas un traitre mot de ce qu’il disait? Probable. S’il l’avait dit en blague, comme il le prétendait maintenant, Ryuuga ne se serait jamais sentit aussi mal à son appartement. Une vague angoisse l’envahit; rien de très dramatique, mais c’était assez agacent dans ce genre de situation. David voulait prononcer les bons mots pour réconforter Ryuuga, il n’avait pas besoin de pression en prime. En effet, David devrait être très diplomatique et délicat dans la conversation qui allait s’en suivre, s’il ne voulait pas que Ryuuga se sente encore plus mal. Quel défi difficile pour l’antisociale qu’il était! Il avait plus parlé avec Ryuuga qu’il n’avait parlé avec n’importe qui dans sa vie, excluant sa famille.

David laissa durer le silence encore quelques secondes. Il fronça les sourcils, toujours en regardant Ryuuga dans les yeux (Et en lui tenant la main). Il se replaça bien droit sur son dossier, pour créer cette impression de grandeur imposante. Comme ça, Ryuuga serait plus porté à l’écouter, plutôt que de penser au genre de chose qui l’avait poussé à déclarer ce qu’il avait affirmé plus tôt. Il choisit un ton neutre, ne laissant transparaitre aucune émotion, pour dire :

« C’est dommage que tu dises ça… »

Encore une de ses fameuses phrases sans fin, rien que pour piquer la curiosité de Ryuuga.

« Parce que j’étais enclin à accepter ton offre. »

Ne surtout pas arrêter de parler maintenant.

« Mais, pour un point, tu avais raison. Ça m’a tracassé, ce que tu m’as proposé. (Il avait pris soin de mettre l’accent sur ce mot) Peut-être parce que je n’ai jamais songé avoir un ange gardien. En fait, je n’ai jamais pensé rencontrer un ange, et encore moins m’attacher à lui (Il voulait que Ryuuga se sente bien, non? Alors qu’est-ce que ça lui couterait d’étaler un peu ses sentiments?). En tout cas, tout pour dire que oui, j’ai observé ton offre sous tous les angles possibles qu’un simple humain peut voire. »

Un petit sourire narquois se dessina sur ses lèvres.

« Et je me suis dit que je n’aimais pas le terme : protégé. Je ne sais pas pour les autres anges et les autres humains, mais moi, je ne serais surement pas juste un protégé. Je veux protéger mon ange aussi, même si ça me coûte la vie, et même si celui-ci me l’interdit. J’aime bien les interdits, en plus… »

Une lueur malicieuse brillait dans ses yeux. En disant ses paroles, David pensait directement à Ryuuga, et il savait bien que lui le comprendrait, aussi. Cependant, il n’en aurait jamais la certitude. C’était ce qu’il y avait de bien, avec les phrases vagues et mystérieuses, elle laissait son auditeur complètement mélangé. Il n’avait plus qu’à dire quelques phrases pour terminer son discours en douceur, et probablement, rétablir un certain équilibre dans les sentiments de l’ange déchu.

« Malgré cela, je me suis dit que t’avoir comme ange gardien, c’était une chance unique je ne devais pas me laisser filer entre les doigts. Déjà, avoir un ange gardien, c’est exceptionnel, et si, en plus, c’est quelqu’un que j’apprécie sincèrement, alors, ça touche réellement du miracle. »

Et, la grande finale :

« Pour cette raison, je te demande de reconsidérer le retirement de ton offre. Je ne veux pas te presser, prend tout le temps que tu veux pour y réfléchir : tant qu’il y a une réponse au bout, évidemment. »

Puis, il se pencha très doucement le haut du corps vers Ryuuga, et lui murmura, presque imperceptiblement :

« Tu vois que tu ne savais pas ce que je pensais… »

Le cœur de David arrêta de battre pendant trois secondes. Puis, il repartit, à un rythme anormalement élevé. Il avait cru entendre, ce qui semblait être une déclaration d’amour. Mais non, ça ne pouvait pas être cela! Et pourtant ça l’est. Il resta figé, incapable de parler. David ne s’attendait vraiment pas à entendre une telle chose. Même ses pensées étaient vides, elles aussi sous le choc. Par la suite, l’évidence de ses paroles le frappa de plein fouet, et il sentit à nouveau qu’il avait le contrôle de son corps. Mais il ne savait toujours pas comment réagir. David aimait Ryuuga, il devrait donc se réjouir de ce qu’il venait de lui avouer. En fait, il devrait probablement sauter sur lui, pour l’embrasser; il n’avait envi que de ça, en ce moment. Mais il savait très bien qu’il devait garder son calme, s’énerver n’avancerait à rien. Et puis, de cette façon, il pourrait savourer ce moment. Il prit une grande inspiration, et déclara, le plus calmement qu’il en était capable :

« Je ne veux pas te quitter non plus Ryuuga. »

David frissonna. C’était bien la première fois qu’il disait ce genre de chose à quelqu’un. S’il ne l’avait jamais fait avant, c’est que le chasseur savait qu’il s’agissait d’un mensonge, mais là, c’était la stricte et pure vérité. David ne souhaitait pas quitter Ryuuga. Jamais. Comment peut-on ressentir des sentiments aussi forts en une journée à peine? Comment peut-on s’attacher ainsi à un inconnu? Peut-être que c’était le destin, après tout. Peut-être que leur relation allait vraiment durer. Il l’espérait, en tout cas, de tout son cœur. Et si Ryuuga ne cessait jamais de l’aimer, cela serait probablement la même chose de son bord.

Alors qu’il y songeait, le serveur apporta leur plat. Il marmonna à peine un «bon appétit» avant de tourner les talons et de s’en aller. En temps normal, il aurait été choqué par l’habitude du serveur, mais en ce moment, il s’en fichait bien. Il était trop occupé à contempler les yeux de Ryuuga, comme pour sonder son âme, bien qu’il en soit incapable. Comme David ne trouvait pas les bons mots, il décida d’agir autrement. Il se leva de sa chaise, et dit :

« Viens, on va sortir un peu. »

Il ne laissa pas le temps à Ryuuga de répondre; il l’entraina presque de force dehors. Après une certaine réflexion, David s’était dit que l’air frais lui ferait du bien pour remettre ses idées en place. Et puis, il y aurait moins de regards indiscrets. Il emmena donc Ryuuga sous un grand arbre, derrière le restaurant. Rendu là, il le serra contre lui. Son cœur battait très vite en repensant à ce qu’il avait décidé de faire, peut-être Ryuuga l’entendrait-il. Cette fois, une multitude de pensées assaillait son esprit, mais il ne se laissa pas perturber par une seule d’entre elle. David sourit à Ryuuga, un sourire comme il n’en jamais fait avant. Il murmura presque, quand il dit :

« Je sais ce que tu veux dire, Ryuuga. »

Il rapprocha un peu sa tête de la sienne.

« Je sais parfaitement ce que tu veux dire… »

Il inspira une grande bouffée d’air, et réunit tout le courage qui restait en lui. Il lui en faudrait, pour faire la déclaration qu’il allait faire. Mais David le ferait, c’est certain. Il ne ferait plus patienter Ryuuga (Sur ce sujet…).

« Parce que je t’aime »

David se pencha et fit, ce qui lui sembla être, le geste le plus extraordinaire et sensé qu’il avait posé de toute sa vie : il embrassa Ryuuga. Il l’embrassa avec une passion qu’il n’avait jamais connu ou ressentit avant. David serrait très fort son corps contre lui. Un agréable frisson le parcourait de la tête au pied. Rendu à ce stade, il n’y a que deux suites possible : soit Ryuuga le repousserait, soit il se laisserait faire. Bien entendu, il souhaitait ardemment que la réalité concorde avec la deuxième possibilité, mais qui saurait le prédire? Oui, bien sur, l’ange qu’il serrait et embrassait en serait capable. Seulement et uniquement lui. En ce moment, David vivait et réalisait aussi tout son attachement, son amour et sa tendresse pour Ryuuga. Certes, il était toujours convaincu qu’il ne méritait pas Ryuuga, mais il savait au moins, maintenant, qu’il pouvait le consoler, l’aider, et par-dessus tout, l’aimer.

La température de son corps avait monté en flèche pendant le baiser, mais il ne s’en souciait pas. David ne mit d’ailleurs pas fin au baiser pour cette raison, il y mit fin simplement pour entendre le verdict de Ryuuga, et, bien évidemment, le laisser respirer librement. Leurs repas pouvaient bien attendre quelques minutes, après tout!

«C’est moi qui ai fait ça ?!...»

David fut perplexe à l’écoute de cette phrase. Il n’avait pas réalisé, lui non plus, qu’ils s’élevaient dans les airs. Il était bien trop concentré sur Ryuuga pour observer le paysage. Et puis, il n’avait pas non plus prévu qu’une telle chose lui arriverait de toute sa vie! Cependant, comme il voulait comprendre la raison d’être de ses paroles, il détourna la tête et regarda autour de lui. En moins d’une seconde, il comprit. David n’en revenait pas! Était-il entrain de rêver? Il ne l’espérait pas. Il avait l’impression de vivre un conte de fées un peu bizarre, mais tout de même très agréable. Il stoppa net sa réflexion lorsque Ryuuga l’embrassa à nouveau. Un silence très agréable se produisait dans sa tête à chaque fois que leurs lèvres se touchaient : même la petite voix se taisait devant tant d’émotion. Bien entendu, cette quiétude se termina lorsque Ryuuga mit fin au baiser, mais cela ne le dérangeait pas, puisqu’il y en aurait bien d’autres. Par la suite, Ryuuga les fit descendre au sol. David fut surpris et impressionné, il lui avait pourtant dit qu’il ne contrôlait pas son pouvoir, et voilà qu’il les faisait voler tous les deux! Et si c’était l’émotion? À ce qu’il avait pu remarquer, Ryuuga avait quelques difficultés à contrôler ses sentiments lorsque ceux-ci s’avéraient trop intenses. Et ça devait être le cas, en ce moment, pour lui! Une déclaration ne laisse jamais personne indifférent, surtout quand c’est réciproque. David se réjouissant; non seulement il avait pour lui seul le cœur de son bien-aimé, mais aussi, il avait désormais un ange gardien! Le chasseur se souviendrait de cette journée toute sa vie, et peut-être même dans sa mort (Tout dépendant d’où il allait aboutir…).

« Bien, on dirait que tu es plus doué que tu ne le crois avec tes pouvoirs. »

David l’embrassa tendrement sur le front.

« C’est prometteur… »

Il observa longuement le visage de Ryuuga, et le magnifique sourire qui l’illuminait. En même temps, David se répétait combien il était chanceux de l’avoir! Il ne voulait pas briser ce moment, resté là pour toujours, dans le confort d’une déclaration partagée pour toujours. Cependant, il faudrait bien qu’il rentre pour manger, mais pas maintenant. Ils resteraient encore quelques minutes. David passa sa main dans les cheveux de Ryuuga, profitant de leur douceur. Il déclara, tout en les caressant :

« J’ai douté, tu sais. Je me demandais si tu pouvais vraiment m’aimer en l’espace d’une journée et demie. C’est vrai que quand on y pense, une journée c’est très court pour réaliser un amour. Et on l’a fait! »

Il soupira.

« C’est une chance qu’on ait décidé tous les deux d’aller au manoir. »

David l’embrassa à nouveau, et laissa durer le baiser plus longtemps. Il savait qu’après ce baiser, ils rentreraient au restaurant. En fait, même s’il ne l’aurait pas voulu, ils y seraient bien obligé : le ciel se couvrait graduellement, et il était très probable que la pluie envahirait le paysage sous peu. David murmura simplement :

« On ferait mieux de rentrer… »

Le chasseur hésita un instant à prononcer la fin de sa phrase. La gêne, la nouveauté, probablement.

« …Mon amour. »

David prit doucement la main de Ryuuga dans la sienne, et l’entraina jusqu’au restaurant. Ils y entrèrent, comme ils l’avaient fait il y a une heure, peut-être. L’ambiance était toujours la même, les gens parlaient aussi forts, mais David ne le remarqua même pas. Il conduit David jusqu’à leur table, où leur repas les avait attendu calmement. David tira la chaise pour Ryuuga. Le jeune homme tâchait de se rappeler toutes les galanteries qu’il avait vues ou apprises pendant sa vie. Ironiquement, il avait toujours trouvé ce genre de geste trop sentimental et idiot; plus maintenant. David se souciait de ce que son nouvel amoureux pensait et penserait de lui et de leur relation. Ryuuga voulait prendre soin de lui, et lui aussi! La vie est tellement bien orchestrée parfois.

David glissa à nouveau sa main contre la sienne. Sous la table, une jambe de David s’était avancée pour caresser délicatement celles de Ryuuga. De sa main libre, il saisit sa fourchette et commença à manger. Quelques secondes plus tard, il commençait à pleuvoir. Après quelques secondes de silence et de réflexion, David dit :

« Je ne crois pas qu’après, on pourra faire quelconque activité plein-air… En fait, je ne sais pas vraiment ce qu’on pourrait faire. »

« Au fait, merci pour ce que tu m’as dit tout à l’heure. Je veux dire… quand tu as dit que tu avais eu des doutes et qu’on avait réussi à faire naître notre amour en une journée et demie… »

Effectivement, ils avaient réussit un tel exploit, de quoi rendre Roméo et Juliette jaloux. (Tout en espérant que leur histoire ne se finisse pas d’une façon aussi dramatique…)

« J’avoue que moi aussi, j’ai eu des doutes, des peurs… Mais il n’a fait aucun doute pour moi que je t’aimais ! Ta tendresse, ta douceur, toute l’attention que tu me portes… Comment ne pas tomber amoureux ?! J’avais juste peur que tu ne veuilles pas de moi… »

Pour une très rare fois, David rougit. Il ne s’attendait pas à un tel compliment, dit avec une telle passion. Conscient de son changement de teint, il tourna brusquement la tête, pour la simple raison qu’il ne voulait pas que Ryuuga s’en aperçoive. Évidemment, rougir n’était pas à péché, mais ça mettait David très mal-à-l’aise. Quelque fois, il détestait ne pas pouvoir contrôler son corps entièrement.

« Hmm…Ouais… »

Il réalisa, seulement quelques secondes après avoir parlé, la rudesse de sa réponse. Un peu comme s’il se fichait complètement de ce que Ryuuga disait, ce qui n’était pas le cas. Il supposait aussi que le fait qu’il ne le regarde pas contribuait à confirmer cette hypothèse. David retourna donc doucement la tête, tout en priant pour que son teint ait retrouvé sa couleur naturelle. Il reprit, sur un ton plus doux :

« Je veux dire…Merci. C’est très gentil ce que tu m’as dit. Sincèrement. »

Pour appuyer ses paroles, David embrassa tendrement Ryuuga.

«Je t’aime tellement ! »

David voulu lui répondre qu’il l’aimait lui aussi, mais il n’eut pas le temps : le jeune ange l’embrassait. Il succomba à ce court baiser en oubliant ce qu’il voulait dire. Mais ce n’était pas important, puisque Ryuuga reprenait la parole.

« On pourrait discuter. J’ai envie que tu me parles de toi. J’ai envie de tout connaître de toi, mon amour. »

Tout connaitre de moi…? Cela ne l’agaçait pas, bien au contraire. En temps normal, peut-être, oui, qu’il aurait été réticent à dévoiler son passé en entier, mais pas face à Ryuuga. C’était un peu normal, après tout, que son petit ami veuille tout savoir de lui! Et ça le touchait. David esquissa un rapide sourire, tout en se demandant par où il pourrait commencer… Ryuuga savait déjà quelques détails sur sa vie, grâce à ses pouvoirs. Par exemple, il savait que David était devenu un chasseur de primes comme son père. Il retourna sa tête complètement vers son amoureux, pour le fixer dans les yeux. David déclara :

« Je veux bien te parler de moi, mais à une condition : que tu me parles de toi en retour. Je fais toujours des affaires donnant-donnant. »

Il rit un peu à cette comparaison de son travail et sa relation. Puis, David redevint sérieux. Il commença son récit d’un ton solennel :

« Bien…Où commencer? Je suis né il y a 24 ans… Hey, tu as quel âge? »

David secoua sa tête.

« Excuse moi, ça n’a aucun lien avec le sujet. Je disais donc… Ah oui, j’ai une grande sœur! Elle a 26 ans en ce moment. Enfin, je veux dire, elle aurait… »

David réalisa qu’il était nerveux; il n’avait jamais parlé de sa famille, après leur mort, à quelqu’un.

« Enfin…J’ai été bien élevé par ma mère, j’espère que ça parait, et j’ai eu une belle enfance. Mon père n’était pas très présent, mais je crois que ça lui faisait plus de peine à lui qu’à nous. Tu sais…Je crois qu’il voulait rester avec nous plus que tout, mais il devait travailler pour nous faire vivre. J-je sais qu’il aimait ma mère, ça se voyait dans ses yeux, et que lorsqu’il n’était pas à la maison, il ne la trompait pas avec une autre femme. Pour cette raison, je n’ai jamais détesté mon père, au contraire, c’était mon modèle. Pourtant, quand j’étais jeune, j’ignorais tout de son métier. Ma mère disait qu’il était PDG dans une banque, et qu’il était tellement important à son travail qu’il ne le quittait que très rarement. Tu sais, quand on est jeune, on croit à peu près n’importe quoi. Mais bon… Pendant mes dix ans, m’a sœur m’a fait remarqué que c’était très peu probable. Je te rappelle que ma sœur est de deux ans mon aînée, donc, elle était dans l’âge de douter de ce que disent les adultes. Et puis, à cause d’elle, je me suis mit à me poser des questions aussi. Et tu sais ce que j’ai fait? »

Il ne lui laissa pas le temps de répondre.

« J’ai profité d’un moment où mon père était chez moi pour me glisser dans son coffre d’auto. Il ne s’en est pas rendu compte, et il a conduit bien normalement vers son "lieu de travail". Cette nuit-là, c’était le manoir. Il avait pour mission de tuer un démon très dangereux, mais ça, je ne le savais pas encore. Si je l’aurais su, probablement que je n’y aurais pas été. Mais je ne connaissais pas ce fait, alors… Je me suis aventuré dans le manoir, mais je ne voyais plus mon père, alors j’ai un peu continué en suivant mes intuitions. J’ai monté les escaliers, et je suis arrivé dans le couloir principal du deuxième étage. Alors, j’ai vu une porte entrebâillée, et, je me suis dit que mon père était peut-être dans cette pièce. Évidemment, mon père n’y était pas, mais le démon, oui. J’ai regardé par l’ouverture de la porte et, le démon en a profité pour arracher mon œil. »

Il fit une pause, pour reprendre son souffle. David n’avait pas l’habitude de parler autant.

« Si je suis encore en vie, maintenant, c’est que mon père était proche, et qu’il a profité de l’inattention du démon pour le tuer. Et, à ce moment, j’ai comprit combien mon père est un héro, et j’ai voulu devenir comme lui. D’ailleurs, maintenant que je suis comme lui, je ne le regrette pas. Mon père est quelqu’un de formidable, et je suis heureux d’avoir hérité d’un peu de lui. Enfin, on s’éloigne encore du sujet… Après, j’ai commencé mon entrainement, si on peut appeler ça ainsi, pour devenir un chasseur de primes. Et puis… »

Comment pourrait-il expliquer la mort de ses parents et de sa sœur? Lui-même n’avait aucune idée de ce qui s’était passé. Cependant, David n’était persuadé que du décès de sa mère et de sa sœur et pas de son père. Il n’avait jamais vu de cadavre.

« Je suis rentré chez moi, un jour, et j’ai trouvé le corps de ma mère et ma sœur. »

Sa gorge commençait à se nouer d’émotion.

« Et mon père est partit, quelque part, loin… »

Son regard errait désormais dans la pluie. Son récit, sans qu’il ne le remarque, avait duré prêt de une heure.

« Je suis désolé… Je sais que ce n’est pas d’un grand réconfort, mais maintenant, tu sais que tu as quelqu’un auprès de toi sur qui tu pourras te reposer en cas de besoin. »

David sortit peu à peu de sa torpeur à l’écoute de ces paroles. Elles résonnèrent un instant dans sa tête, réconfortantes. Il avait dit vrai, et visé juste pour réconforter David. Il avait Ryuuga maintenant, c’était vrai. À cet instant, il pensa que Ryuuga ressemblait à la fameuse lumière au bout du tunnel, mis à part qu’il n’était pas mort, que le tunnel était sa vie et que, bien évidemment, la lumière était une personne. David pourrait conter sur son amoureux n’importe quand, n’ importe où, et pour n’importe quoi. C’était particulièrement réconfortant. Quelque part dans les tréfonds de sa tête, le chasseur était convaincu qu’il ne serait plus jamais seul. Peut-être pas physiquement, mais mentalement oui. En quelque sorte, Ryuuga ne le quitterait jamais, vu son nouveau statut d’ange gardien. David sentit un doux calme l’envahir. Il n’était plus triste, seulement ambitieux de vivre cet avenir plein de promesses. Son regard quitta la pluie, et alla se poser sur celui de l’ange. David dit, d’une voix à nouveau confiante :

« Tu as tort. Ce que tu m’as dis est d’un grand réconfort. »

Et puis, il y eut ce petit bruit, émit par le ventre de Ryuuga. Évidemment, il doit être mort de faim! Il m’a écouté pendant presque… (Il jeta un coup d’œil à une horloge suspendue non loin d’eux) une heure? Ah, j’ai parlé comme une vraie pie! Et je n’ai pas mangé moi non plus…

David regarda son assiette. Il n’avait plus faim. Il reporta donc toute son attention sur son amoureux, qui avait commencé à manger ses frites. Il sourit devant cette scène, quoique banale, mais aussi attendrissante. Ryuuga pouvait se montrer tellement mignon, pourvu d’une innocence pure et charmante. En même temps, cette pensée était un peu ironique, puisque Ryuuga a le don de tout voir, tout savoir, et ainsi, perdre cette innocence, qu’on traine parfois très longtemps de l’enfance. Pourtant, il l’avait toujours, et David le considérait simplement fantastique pour cela. Comment faisait-il? Il n’aurait su le dire. Tu devrais sortir de ta tête, Ryuuga parle. Chut, et écoute! Il écouta cette petite voix intérieure.

« Je vais… Enfin… Désolé… »

David rit de bon cœur.

« Ne te sent pas mal pour si peu, voyons. Il y a des crimes plus pires qu’avoir faim. »

Il passa rapidement sa main dans les cheveux de Ryuuga, puis affirma :

« Tu es tellement mignon. »

David jeta un rapide coup d’œil à l’extérieur. Le temps s’était encore gâté, mais cela ne le dérangeait plus tellement. Il savait qu’il allait avoir droit bientôt au récit de Ryuuga, un moment que David allait apprécier, puisqu’il allait en savoir plus sur lui.

« Il est temps que tu honores ta part de notre engagement, si tu ne veux pas que je te punisse, mon chéri. Je ne suis pas tellement imaginatif, mais je suis sur que je pourrais te trouver un châtiment qui te convient. »

Il sourit de plus belle.

« Allez parle moi de toi, et n’oubli pas de me dire ton âge. »

[Désolé, c'est vraiment court ^^']

[ Ah, tu es tellement gentille! =) ]

«Oui !... Et bien, j’ai 17 ans… Je ne suis encore qu’un « bébé » chez les anges ! »

Un bébé? Ce séduisant jeune homme qu’il chérissait n’était donc qu’un bambin chez ces êtres ailés qu’on appelle les anges? Il ne le croyait pas. Mais, il devait bien se l’avouer; il ne savait rien de ce sujet. Les anges peuvent êtres bizarre, il le découvrait de plus en plus à chaque jour. Mais, il n’y avait pas d’étrangeté plus belle que celle que portait, comme un fardeau (Alors qu’à son avis, s’il demandait à David un jour, cela était plus une bénédiction) Ryuuga. C’est vrai, il était spécial. Mais David aussi était spécial. Alors, les choses uniques et un peu excentrique, il aimait cela. En fait, la régularité le barbait tellement!

Plus il y pensait, plus cela faisait du sens. Les anges étaient immortels, pas les humains. Alors, il était évidemment bien normal pour une créature céleste d’un milliard d’années de considérer qu’un charmant jeune homme de dix-sept ans, aussi séduisant soit-il, soient considéré comme un bébé. Mais qui s’en souciait, là-haut? Les anges avaient chassés Ryuuga du Paradis (Il y pensait en même temps d’écouter le récit de Ryuuga), pout une raison futile et insultante. Son pouvoir, rien que pour son pouvoir! C’était abhorrant. En cet instant, la vision que David avait des anges changea complètement. Avant, le chasseur les voyaient comme des êtres doux et paisible, qui jonglaient parfaitement avec l’art de la sagesse et de la douceur. Plus maintenant. Maintenant, David comprenait qu’ils avaient de stupides préjugés, et qu’ils n’étaient pas si respectables qu’ils voulaient le laisser croire. En fait, ils étaient presque l’égal des humains dans leur sens moraux! Eux qui disent tout le temps que nous sommes des créatures inférieures douées de valeurs douteuses, et bien, ils ne font pas mieux! J’veux bien accepter que j’suis pas parfait, mais eux, qu’ils ne viennent plus me casser les oreilles avec leur perfection, qui n’est pas si parfaite.

Ah, Ryuuga était un médium? C’était logique, très logique en fait. Il utilisait son pouvoir pour se faire vivre, et si David avait le même, il l’utiliserait probablement aussi pour se faire un peu d’argent. Ou peut-être pour ne pas me mêler d’affaires louches… Soudain, il réalisa quelque chose. David fronça les sourcils à cette idée qui lui avait vaguement parcouru l’esprit. Il marmonna, à voix basse :

« Des démons… »

Une étrange colère muette l’envahissait. Il plongea son regard dans son assiette, observant sans but sa lasagne qui devait être désormais froide. Le son de la pluie lui parvenait doucement aux oreilles, mais il n’en prêtait pas attention. Quelque chose d’autre aussi, peut-être la respiration de Ryuuga. Calme-toi, Dave. Reprend-toi. Tu n’as absolument aucune raison d’être fâchée. Ne gâche pas ce beau moment avec un saut d’humeur. Oui, ton amoureux offre ses services de médium à la race que tu détestes le plus, mais ce n’est pas grave! Ça ne te concerne absolument pas! Il a bien droit de faire ce qu’il veut, non? Et tu sais que ce que t’es entrain de faire, c’est une crisette de jalousie? Contre une race toute entière! T’as perdu d’avance mon grand! David soupira. Cette petite voix intérieure avait raison. Finalement, elle disait des choses intelligentes, parfois…

David releva rapidement la tête, et dit, d’un ton faussement enjoué :

« Et tu fais beaucoup d’argent, avec ton métier? Assez pour payer ton loyer? »

David s’inquiétait, c’était vrai. Si Ryuuga avait des problèmes d’argent, David lui viendrait en aide, ça, c’était certain. En fait, il lui viendrait en aide pour n’importe quel problème qui se présenterait dans la très longue vie de Ryuuga. Vie qu’il partagera, en grande partie, sans moi… L’inquiétude avait laissé place à tristesse. Mais, à nouveau, il chassa de son esprit. Pour se changer les idées, il dit, plus solennellement :

« Tu n’as pas eu la vie facile avec les anges… Je ne les imaginais vraiment pas comme cela, d’ailleurs. Évidemment, je n’avais non plus pas grand-chose sur quoi me fier pour baser mon opinion. Je n’ai jamais vraiment lu la Bible, non plus. La religion, ce n’est pas vraiment mon truc, mais ça, tu dois l’avoir remarqué. »

David fit une pause, réfléchissant à la suite.

« Dit moi, c’est comment le Paradis? »

«En fait, je ne paie pas de loyer ! J’ai rendu un service au propriétaire… Et puis, j’en ai profité pour lui faire un peu peur… »

Un peu peur? Cette remarque l’amusa. Ryuuga n’était pas si enfantin, finalement! Il avait une touche malicieuse très bien enfoui en lui. Cachée, quelque part au plus profond de son être, qui ressortait lorsqu’une situation profitable se présentait. David devrait peut-être même le surveiller, à l’avenir. Il sourit encore plus, à cette pensée. Surveiller Ryuuga serait probablement un passe-temps qu’il adorerait, mais il ne s’y adonnerait jamais. En fait, il ne pouvait pas vraiment le savoir… Qui pouvait connaitre l’avenir? C’est mon amoureux voyons! Bien sûr, c’est mon petit Ryuuga que j’aime tant! Logé gratuit en plus? L’être qui faisait battre son cœur avait compris le secret idéal pour dénouer les cordons d’une bourse. Tous les deux pourraient en tirer profit, évidemment, pour devenir riches. Mais ils n’étaient pas si sournois, n’est-ce pas?

« Qu’as-tu donc fait, pour lui faire : “Un peu peur”? »

Il écouta par la suite sa précision sur sa relation avec les anges, et comment il voyait les humains. David ne s’était jamais senti coincé entre les anges et les démons, mais maintenant que Ryuuga soulevait le point, cela faisait drôlement du sens. Ni complètement bon, ni complètement mauvais, toujours perdu entre les deux… Tenté par des plaisirs charnels, et éclairé par les résonnements du Divin, là-haut. Ryuuga conclut son discours avec un :

« Et puis, tu es ici, toi, pas là-haut, alors je suis heureux ! »

David eut l’impression de rougir encore. Une douce joie lui emplit le cœur. Quelque chose de chaud pour percer le froid hiverner de ses sentiments. Un peu comme le feu sous la glace, qui attend uniquement que celle-ci cède pour montrer combien il est beau et majestueux. Quelle grande métaphore pour une petite âme! Et pourtant, c’était la vérité. Rien que pour Ryuuga, il allait briser cette glace, et lui montrer combien il pouvait être… Chaud? Non non, cela sonnait mal, et avait une certaine consonance érotique. C’était même très comique.

« Et moi je suis heureux que tu sois ici, avec moi. Je t’aime. »

S’enchaina alors la description du Paradis. Étrange, mais on aurait dit que le monde des humains était très semblable au Paradis des anges. En fait, David avait l’impression que le monde humain était bien meilleur que celui des anges! Les humains étaient libres de leur vie, où ils allaient, qui ils étaient, et surtout, ils pouvaient faire tous les choix de leur existence. Ils avaient leur vie en main à partir de la majorité, et peut-être même avant (Comme dans son cas). Ryuuga avait raison. Il était bien mieux ici qu’au Paradis. Et puis, ici, David pouvait prendre soin de lui!

« Bien, je n’imaginais vraiment pas le Paradis comme ça… Pour les anges en tout cas. Je m’imaginais le truc classique : des anges qui jouent de la harpe sur des petits nuages sous un soleil radieux. Tu dois trouver ça bizarre! Mais c’est habituellement comme ça qu’on visualise le paradis chez les humains. Et je ne savais pas non plus que les anges avaient une interdiction de relation sexuelle! Pour rester pur, je suppose? Enfin, quelque soit la raison, c’est stupide… Je ne vois pas pourquoi un ange ne pourrait pas avoir une famille. C’est bien, une famille, ça te rend heureux, parce que tu as quelque chose qui te motive dans la vie! Et puis, cette histoire de titres et de rangs… (Il soupira en guise de fin de phrase) »

Il garda le silence quelque temps, réfléchissant à ses propos.

«Mais tu n’as presque rien mangé ! Tu n'as pas faim ? »

Ce soudain changement de sujet le fit sortir de ses pensées. Il jeta un rapide regard à son assiette, encore pleine. Les pates l’attendaient, mais David n’y toucherait pas. Ryuuga avait vu juste, il n’avait pas faim. Il avait perdu l’appétit lorsqu’il avait raconté son passé, cette soudaine tristesse, remplacé par la joie, puis par la jalousie et finalement par l’apaisement avaient suffi pour lui couper la faim. Que pouvait-il dire? La vérité, simplement.

« Non, je n’ai pas très faim…Je…J’ai perdu l’appétit. Et puis je préfère de loin parler avec toi que manger. »

David regarda l’assiette de Ryuuga.

« Mais ce n’est pas ton cas à ce que je vois! Tu prendras bien un petit dessert? Je suis sûr qu’il doit y avoir des trucs que tu aimes… »

Il l’embrassa à nouveau, cette fois plus longtemps. Après que leurs lèvres se soient séparées, David demanda la carte des desserts pour Ryuuga au serveur. Celui-ci l’apporta quelques minutes plus tard. Il la parcouru du regard avant de la tendre à son amoureux. Tout en lui donnant, il demanda :

« Ma mère m’aurait probablement tué en entendant cette question mais… Dieu, il existe vraiment? »

Sa mère, une fervente croyante, n’aurait pas accepté le doute de son fils face à cette évidence même. Mais David était sceptique, il ne croyait que ce qu’il voyait et… Personne n’avait jamais vu Dieu. En tout cas, pas un humain.

« Mais je le fais déjà… Brûler les calories. Je me suis rendu compte que le sucre était le moteur de mes visions ! En fait, je les supporte mieux lorsque j’ai mangé quelque chose de sucré… Ca me demande pas mal d’efforts et le sucre, ça m’aide bien… plus que tout le reste ! Mais ça me ferait plaisir de faire un peu d’exercices avec toi. »

Ah, cela pourrait servir d’une habile excuse pour camoufler sa gourmandise! David sourcilla. Il ne croyait pas vraiment ce que Ryuuga venait d’affirmer, mais le faire remarquer serait probablement impoli… Surtout s’il disait vrai. En fait, David savait déjà qu’une partie était vraie : ses visions exigeaient une grande énergie, il l’avait déjà vu à son appartement. Le pauvre Ryuuga était tout en sueur! Il se demanda un bref instant si ses visions étaient toujours aussi intenses. Si tel était le cas, alors, David était bien heureux de ne pas avoir le don de double vue. Et puis, peut-être serait-il malheureux de voir le futur. Pour un humain, rien de mieux que l’inconnu du lendemain!

« Oui, on pourrait faire de l’exercice… »

Son sourire s’élargit à cette idée, et à tout ce qu’elle englobait. Il se ravisa cependant très vite, de peur de paraitre ridicule, à sourire sans aucune raison. Enfin, pas une raison qui se dise, en tout cas. Il écouta le choix de dessert de Ryuuga, et le nota mentalement. Chaque détail qu’il apprenait sur lui pouvait être utile. David était un véritable bloc note psychologique, il pouvait noter beaucoup d’informations sans les oublier pendant des années.

«Je pense qu’Il est en chacun de nous… enfin, je veux dire sa lumière « pour nous guider ». Jusqu’à présent tu ne croyais pas vraiment en lui et pourtant, tu as une moralité et des principes droits et justes. Tu vois ce que je veux dire ?! »

Il réfléchit un instant à ses paroles, avant de lui répondre :

« Je le vois Ryuuga, je comprends aussi… Tu as raison sur ce point, j’ai beaucoup de misère à croire en lui, et pourtant, je suis les enseignements qu’il aurait donnés aux humains. Il est peut-être en chacun de nous au départ, mais certainement pas à la fin. Je veux dire par ça que… Certains humains renient les valeurs qu’il a enseignées, en essayant de suivre une voie démoniaque quelconque… Si tu veux mon avis ces personnes-là ont plus l’air d’idiots que d’autre choses, parce que les démons se servent uniquement d’eux, et qu’ils ne deviendront jamais des démons. Enfin, peut-être existe-il des rituels pour ça aujourd’hui, mais sincèrement, j’espère que non. Tout pour dire que s’il existe en moi, et surement en toi, parce que tu es quelqu’un de très respectable, ce n’est pas la même chose pour tout le monde. »

Il reprit son souffle après son discours, tout en espérant que ses paroles n’ait pas sonnées trop stupides.

«Tu n’as rien d’une petite créature, crois-moi ! Ce sont les humains, les plus incroyables et toi, tu es le plus incroyable de tous les humains ! »

David rougit à nouveau, mais cette fois-ci, il ne le sentit pas. Il regardait Ryuuga dans les yeux, totalement hébété par tant de gentillesse à son égard. Il voulu parler, répondre, mais Ryuuga l’embrassait déjà. David se laissa faire, entoura ses bras autour de la taille de la taille de Ryuuga, et lui rendit son baiser avec la même passion. Lui non plus ne remarqua pas les couvercles qui volaient, ni tous les gens qui les regardaient. David prit quelque temps, après ce baiser, pour retrouver ses esprits. Il observa Ryuuga qui l’observait lui-même, tout en se disant qu’il devrait reprendre contrôle de lui bientôt, sinon il aurait l’air complètement niet. David ne put que bafouiller, complètement désemparer…

« J-je t’aime moi aussi… »

Et c’était évidemment la vérité.

« Alors ? Est-ce que tu es d’accord pour me commander toutes ces bonnes choses sucrées ? »

David sourit, il se sentait un peu plus en confiance, avec ce changement de sujet.

« Oui, je suis prêt. Tant que tu n’es pas surexcité après. »

David balaya la salle du regard. Il repéra aussitôt le serveur qui les avait accueillit. Coup de chance, celui-ci s’approchait d’eux. Lorsqu’il arriva à leur hauteur, il demanda :

« Avez-vous fait vos choix, messieurs? »

Il jeta un rapide coup d’oeuil à Ryuuga, puis reporta son attention sur David. De son coté, celui-ci réfléchissait. Si Ryuuga disait ses choix, le serveur le dévisagerait surement, se disant que c’était un goinfre. Il adopta donc une autre stratégie :

« Je vais prendre une glace choco-menthe, des profiteroles, et mon ami va prendre une crème brulée. »

Le serveur resta un instant silencieux, puis nota les desserts, avant de tourner les talons et de s’en aller. David retourna sa tête pour fixer Ryuuga à nouveau.

« Ne t’inquiète pas, je n’en prendrais aucun. Je ne voulais pas qu’il te dévisage en pensant que tu es un goinfre, c’est tout. Tu as juste... Un peu la dent sucrée.»

La main de David alla caresser le doux visage de Ryuuga.

Ryan sursauta en entendant Ryuuga parler (il était bien trop concentré dans l’explication de sa situation pour encore se souvenir que David avait un invité). Il fut d’autant plus surpris en sentant le contact physique qu’il établit. L’homme d’affaire le regarda sans comprendre, cessant toutes paroles. S’il aurait su, en ce moment, que Ryuuga lisait en lui comme dans un livre ouvert, il aurait probablement rompu le contact, se serait éloigné tout en le traitant de sorcier. Mais il n’en fit rien, simple d’esprit qu’il était, il ne pensait pas à ce genre de choses. Quant à David, un léger frisson de dégoût le parcouru lorsqu’il vu son amoureux saisir le poignet de Ryan, même si David savait (du moins, il s’en doutait) pourquoi Ryuuga faisait cela. Quelques secondes plus tard, alors qu’un silence pesant régnait autour de la table, Ryuuga lâcha son poignet, et déclara :

«Tu sais, je n’apprécie pas du tout la façon dont tu te comportes avec David… ni les contrats que tu lui as proposé et encore moins celui-là. Tu mets sa vie en danger plus que de raison, parce que tu n’es incapable de savoir t’entourer. Tu penses que ton argent va résoudre tous tes problèmes, mais crois-moi… là où tu iras, il ne te sera d’aucune aide. Si j’ai un conseil à te donner, c’est d’aller rejoindre ton « amie » et d’oublier par la même occasion l’existence de David. »

Ryan resta bouche bée par cette réplique, un peu comme David. Le chasseur s’attendait à quelque chose dans le genre, mais il ne s’imaginait pas que Ryuuga allait répondre aussi crument. Peu importe, puisqu’il eut tôt fait de la trouver drôle. Il ricanait à l’intérieur de lui, en se disant que Ryuuga n’avait pas finit de le surprendre. Ryan, après avoir retrouvé ses esprits, bredouilla :

« B-bien… »

Il remarqua les objets, sur la table, qui tremblaient. David aussi, par la même occasion. Ryan les fixa longuement, comme s’il cherchait une manière plausible d’expliquer ce phénomène. David, lui, connaissait déjà la cause. Il retourna son visage et regarda longuement Ryuuga. Ses traits étaient quelques peu déformés par une colère muette, mais étrangement, David le trouva toujours aussi beau. Ryuuga ressemblait beaucoup plus à un véritable ange déchu, froid et menaçant. En fait, en ce moment, c’est plutôt lui le prédateur! Pensa-t-il avec humour.
Ryan aussi semblait l’avoir compris. Peut-être n’avait-il pas saisit d’où venait ce phénomènes qui faisaient inexplicablement bouger les choses sur la tables, mais il avait compris qu’il fallait mieux laisser David et son charmant invité (Qui, dieu merci n’était pas payé pour l’aimer) seuls. Ryan se leva donc, esquissa un sourire nerveux, avant de dire :

« Bien, si c’est comme ça, je vais vous laisser en tête-à-tête! Oh, et, tu y repenseras, David, même si ton ami n’est pas d’accord. Un peu d’argent, ce n’est jamais de refus! »

David aurait bien aimé dire le contraire, mais il en serait incapable. Il n’aimait pas réellement l’argent, qui était le vice de la plupart des hommes, mais il y faisait cependant très attention. Il surveillait de près ses dépenses, et la sortie d’aujourd’hui était une exception qu’il paierait pour Ryuuga, parce qu’il l’aimait tellement. D’ailleurs, pensant à Ryuuga, il devrait bien lui parler, maintenant que Ryan était partit. Le jeune se retourna vers son amoureux, et s’excusa :

« Je suis désolé pour Ryan, et s’il t’as agacé. Il m’agace aussi d’ailleurs, parce qu’il ne sait pas comment faire son travail et que ça retombe souvent sur moi. Ah, mais ça, tu l’as déjà vu, je n’ai pas besoin de te le répéter. »

Un nouveau sourire illuminait son visage. Il continua :

« Tu sais, tu lui as dit : Tu penses que ton argent va résoudre tout tes problèmes, mais crois-moi, là où tu iras, il ne te sera d’aucune aide. Qu’est-ce que tu voulais dire par : Où tu iras? Enfin, si ce n’est pas trop indiscret de demander l’avenir d’une autre personne… »

David rit un peu, avant de continuer :

« Même si cette personne est l’un des plus gros idiots de la terre. »

«… Il devrait apprendre où est sa place et à y rester ! Je n’ai pas aimé la façon dont il a essayé de sympathiser avec toi. C’est pas parce qu’il t’a donné des contrats qu’il peut se permettre de faire comme si vous étiez amis. Tu n’es pas son ami ! »

Ryuuga disait tellement vrai. Chaque mot avait déjà été pensé par David lui-même, et à peu près dans le même ordre. À un détail près; David y avait pensé avec une certaine amertume, et non avec la fougue et la rage qui animait désormais le jeune ange. Ce feu qui l’habitait secrètement le surprenait encore, lui qui, il y a de cela à peine une heure, l’imaginait doux et calme. Il s’était bien trompé, Ryuuga s’avérait être plein de surprises. Mais ce n’était pas si désagréable, finalement, de découvrir que son petit ami avait de nombreuses facettes cachées (Tout comme David). Cela le rendait d’autant plus intéressant. David resta silencieux, cherchant quoi répondre à cette affirmation. Mais ce silence sembla peser sur Ryuuga, qui bredouilla :

« … Heu… Enfin… Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire… Heu… Tu peux avoir qui tu veux comme ami…. Je suis désolé… »

Évidemment.
Le chasseur sourit (Personne n’aurait pu retenir un sourire devant une telle scène). Le caractère un peu gaffeur de son amoureux avait refait surface. Il ne semblait plus fâcher, simplement très embarrassé. L’attitude de Ryuuga avait toujours eu quelque chose de tellement attendrissent que David attribuait à son innocence. Mais il n’était pas vraiment innocent, il ne le serait jamais. Il pouvait voir, connaître, savoir, ce qui brisait toute forme d’innocence, même la plus petite. Ryuuga était un véritable mystère vivant.

« Non, ne t’excuse pas. Je comprends ce que tu veux dire, et tu as parfaitement raison, je ne suis pas son ami. Rien qu’une relation de travail, comme tu as pu le voir. »

Puis, Ryuuga expliqua le sort que réservait le destin à Ryan. Cela ne le surprenait pas trop. Ryan était quelqu’un de détestable et un inconvénient pour la plupart des gens ambitieux, il était donc normal que certaines personnes veuillent le tasser de leur chemin, d’une manière plus ou moins radicale. Mais il les avait surement poussé à l’extrême pour avoir ce genre de traitement. C’était habituellement ce qui se passait lorsque que quelqu’un refusait d’arrêter ou de suspendre ses activités, même après une demande très polie. Ce genre de métiers étaient compliqués, surtout avec les relations sociales, et pour cette raison David était heureux de n’être qu’un simple homme de main.
Il se gratta la tête, avant de répondre :

« Oh, tu sais, ça ne m’intéresse pas tant. Je m’en fiche bien que Ryan meurt ou devienne le roi du monde, ce qui est très improbable d’ailleurs. Je me demandais comment un type dans son genre allait mourir. Il ne doit même pas y croire, à la mort. Il doit se dire que ça n’arrive qu’aux autres et pas à lui, mais c’est faux. »

David soupira, puis regarda leurs mains que se serraient depuis déjà très longtemps.

« Ça va te sembler bizarre, mais je plains un peu Ryan, parce qu’il est seul. Oui, je sais, on est tous seul à un moment ou à un autre, mais généralement jamais lorsqu’on est dans des mauvaises passes. Lui, lorsqu’il va réaliser dans quelle situation il est, il va demander de l’aide, mais personne ne voudra l’aider. Qu’est-ce que ça donnerais, d’ailleurs, d’aider quelqu’un comme lui? Il y en a des milliers de semblables faits dans le même moule, et j’espère sincèrement qu’ils vont tous finir comme Ryan. »

Il avait parlé d’une voix morne et lente, sans expression. David savait bien qu’il aurait du être en colère comme Ryuuga, mais rien de tout cela ne l’animait. Lui aussi aurait dû lâcher un rire sinistre! Un rire sinistre? David fixa à nouveau son amoureux. Il avait beaucoup de misère à croire que ce son qu’il venait d’entendre était celui de Ryuuga. Pourtant, il n’y avait aucune personne, et aucune autre possibilité. Ryuuga était un étrange livre qui s’écrivait à chaque seconde, au gré de ses émotions, sans suivre un scénario précis. Un recueil de mystères, mais aussi de beautés. David préféra ne pas passer de commentaire sur ce rire, de crainte de peiner son amoureux. Il se concentra plutôt sur la suite de ses paroles :

« Mais dis-moi… Tu as besoin d’argent ?! Tu peux me le dire tu sais…. Je pourrais t’en donner si tu veux. J’ai un peu de sous de côté…. »

David sentit surgir violement un sentiment en lui à l’écoute de ces paroles. Les questions d’argent avait toujours été délicate pour lui. C’était quelque chose qu’il, depuis sa plus tendre enfance, se considérait être apte à gérer. Ce sentiment qui prenait désormais place en lui à cette minute était son énorme ego en ce qui touchait les billets verts. David n’était pas homme à admettre qu’il avait besoin d’argent. Et puis je n’en ai pas besoin de son argent! Je vais me trouver un nouveau contrat, faire un paquet de jolis billets, et l’amener ici, à nouveau, une fois ou deux, pour manger. Tu n’as aucun soucis à te faire, Dave, du coté financier. Tu sais bien gérer ta situation!

« Tu es gentil Ryuuga mais… Je n’ai pas besoin d’argent. Je commence juste à regarder pour un contrat, c’est tout. Ne t’en fais pas, je m’en trouve toujours un. C’est très payant, tu sais? »

David soupira de soulagement en entendant Ryuuga changer de sujet. Presque aussitôt, son fort égo disparu de lui, ne laissant qu’un simple vide que l’amour allait probablement combler dans très peu de temps.

«Je ne t’empêcherai pas d’exercer ton métier. Mais, s’il te plaît, viens me demander de l’aide si tu en as besoin plutôt que de devoir accepter des contrats trop dangereux. Je ne veux pas qu’il t’arrive quelque chose…. Ni que tu manques de quoique se soit. »

Le jeune chasseur fut surpris par tant d’émotions. Ryuuga lui serrait la main, très fort. Il le sentait, mais ça ne lui faisait pas mal. Pendant qu’il pensait aux bonnes paroles à répondre à tant de si beaux mots, il entendit son amoureux continuer, sur le même ton, ce qui ému encore plus David :

«Tu me le promets ? Hein ?!... Tu me le promets ! »

S’il se serait écouté, le jeune humain lui aurait sauté dessus pour l’embrasser et lui promettre. Mais ils étaient dans un lieu public, et il valait mieux que David garde ce genre d’émotions fortes pour lui. Il l’embrassa cependant tout de même, avec une passion qui le surprit lui-même. C’était sa première réponse. Sa deuxième ne tarda pas avec la fin du baiser. Il murmura, tout doucement, oubliant son ego, l’argent ou Ryan :

« Je te le promets. »

Après un léger moment d’hésitation, il rajouta d’une voix qu’il aurait espéré neutre, mais qui était chargé d’émotions :

« Mais tu dois me promettre la même chose aussi. »